TPE 2006-2007: Le Bioethanol

L'Europe en retard de développement

 Dans un deuxième temps, nous avons logiquement voulu étudier la position de l'Europe par rapport au développement du bioéthanol, puisque la politique qui y est menée nous concerne directement,en tant que membre le l’Union Européenne.

a) Les directives européennes
Tout d'abord, nous avons voulu réaliser un état des lieux concernant la politique commune, et non sur celle de chaque pays européen.
 Notre première impression, à la vue des chiffres notamment, est que le vieux continent présente un retard certain en comparaison avec les programmes de grande ampleur menés au Brésil comme nous l’avons vu, et aux Etats-Unis.
 En effet, seule la France a menée une politique relativement suivie dans le domaine lors des vingt dernières années.
 D’une manière générale donc, la politique européenne antérieure aux années 2000 est pour ainsi dire quasi inexistante.

Tout comme le Brésil après le contre-choc pétrolier, l’Union Européenne a optée pour la voie du mélange (incorporation d'éthanol à l'essence). Mais les taux sont chez nous beaucoup moins élevés que dans le pays d’Amérique de Sud.
 L’utilisation et la taxation des biocarburants reposent aujourd’hui sur plusieurs textes communautaires, qui autorisent l’incorporation dans l’essence d’éthanol jusqu’à 5%, et d’ETBE jusqu’ 15%, pour une vente banalisée à la pompe.
 Bien sûr, des taux plus élevés sont parfaitement compatibles avec les moteurs actuels, mais une information  la pompe est alors obligatoire.
 Ces textes permettent aussi aux états membres de choisir leur politique vis à vis du carburant.
Ainsi les pays sont confrontés à deux options :
 - Exonération des taxes sur les biocarburants, ce qui implique un coût moindre pour les sociétés de carburant, et pour les consommateurs à la pompe
 - Sinon, l’Etat peut opter pour une obligation d’incorporation qui, comme son nom l’indique, oblige les compagnies à intégrer des pourcentages de bioéthanol dans leur essence.
 Certain pays ont optés pour un système comprenant les deux options, comme le montre la carte ci-dessous.

 


La directive sur la promotion des biocarburants, crée en 2003 a fixé des objectifs croissants de consommation de biocarburant dans le domaine des transports.
L’objectif a atteindre était que la consommation d biocarburant représente 2% de la consommation totale de carburants pour 2005 ; ces consommations devront ensuite, pour l’horizon 2010, représenter au minimum 5.75% des consommations globales d’essence et de diesel. Ces objectifs étaient alors seulement indicatifs et non obligatoires.
 Chaque Etat devra informer la Commission des mesures prises pour les atteindre.
Cette directive aura cependant été modifiée deux ans plus tard en 2005, obligeant à partir  cette date l’incorporation de biocarburants dans l’essence.
Maintenant que nous avons vu quelle est la politique menée globalement par l'Union Européenne, nous allons nous intéresser à ce qu'il en est dans chaque Etat.

b) La réalité du bioéthanol par Etat
En 2003, la production européenne d’éthanol reste concentrée en France, en Espagne, en Pologne, et dans une moindre mesure en Suède.
 En Europe, d’une manière générale, à l’exception de la Suède, et contrairement à la situation des Etats-Unis ou du Brésil, l’éthanol était alors pas utilisé directement mais transformé en ETBE, pour des problèmes de volatilité de l’éthanol pur.
 La France, longtemps leader de la filière en Europe est aujourd’hui dépassé par l’Espagne et la Pologne, comme le montre tableau ci-contre.

 


 On note ainsi que l’Espagne se montre l’acteur le plus dynamique du continent, et disposerait d’une capacité de production énorme (de l’ordre de 500 millions de litres), principalement issue de blé et d’orge.
 
 Autre élément qui nous interpelle : la Suède consomme plus qu’elle ne produit.
L’essentiel de la différence entre la production et la consommation est importé du Brésil ou d’Espagne. Au jour d’aujourd’hui on assiste au pays scandinave a une quasi-généralisation de l’E5, depuis début 2003 et au développement plus que conséquent de l’E85. Le pays compte à terme consommer environ 160 000 tonnes de bioéthanol (soit 1/5 de la consommation totale européenne actuelle).
 
On observe le même phénomène d’importation au Royaume-Uni, qui fait venir la totalité de sa consommation de l’étranger, presque intégralement du Brésil.

 Enfin, l’Allemagne s’engage à son tour sur la voie éthanol. Trois distilleries sont en cours de construction ou ont même déjà été inaugurées, ce qui devrait doter les germaniques d’une capacité de production de près de 500 000 tonnes par an, ce qui représente la totalité de la production européenne en 2003.
 En France, la politique d’incitation fiscale a été pleinement suivie par l’Etat.
Ainsi, en 2005, les quotas donnant droit à une défiscalisation partielle pour l’éthanol s’élevaient à 135 000 tonnes sous forme d’ETBE mélangé a l ‘essence, et 72 000 tonnes d’éthanol pur à utiliser en mélange direct à de l’essence.
La consommation en 2005 s’est donc faite essentiellement sous forme ETBE, dont les quotas ont presque été atteints (114 000 tonnes).
En revanche, les volumes d’éthanol pur bénéficiant de cette défiscalisation n’ont pas été mis sur le marché.
Les Pouvoirs publics cherchent donc à promouvoir l’usage de l’éthanol au travers de différentes actions, et notamment l’année dernière, en 2006.
À cette époque, une expérimentation a été menée à Rouen sur l’usage de l’éthanol en mélange avec des essences.
De plus, il y a eu une forte promotion de l’utilisation de l’E85 avec la mise en place d’une flotte expérimentale de véhicules flexfuel utilisée pendant 12 mois par le Conseil général de la Marne et à la vente de ce nouveau carburant avec une fiscalisation adaptée.
Plusieurs centaines de stations-service  devraient distribuer ce nouveau carburant en 2007 en parallèle de la mise sur le marché de véhicules dits flexfuel pour la population civile par les constructeurs automobiles.

Bilan
On peut donc dire que l’Europe malgré son retard conséquent, est en train en ce moment de tenter de se rattraper.
 Cependant, les objectifs fixés par l’Union Européenne n’ont pas été atteints. Par rapport à un taux initialement prévu de 2% soit 5.8 Mtep de biocarburants produits pour l’année 2005, le taux actuel se situe aux alentours de 1.2%.
L’objectif pour 2010 d’atteindre 5.75% d’incorporation reste cependant fixé ; pour l’atteindre, l4europe devra consommer 16.6 Mtep de biocarburants à cet horizon. Mais ici s’est posé un sérieux problème ; en effet, nous avons établi qu’une telle production de biocarburants nécessitera environ 82 000 tonnes de produits agricoles, soit une surface d’environ 14Mha.
Et un grave problème se pose lorsque l’on sait que la totalité des surfaces de jachère en Europe (8.2Mha) est insuffisante pour accueillir une telle culture.
 Dès lors, il apparaît que d’autres terres que les seules jachères devront être mobilisées pour atteindre les objectifs d’incorporation de biocarburants pour l’horizon 2010.
À moyen terme, les solutions envisageables sont les suivantes :
-L’utilisation du surplus agricoles, comme cela est déjà le cas avec les surplus de vin transformés en éthanol. La capacité de ces surfaces s’élève à 8.2 Mha, ce qui ne suffit donc pas à atteindre le taux prévu pour 2010.
-L’autre solution serait le recours à l’importation massive, notamment du Brésil ; solution qui semble incontournable.
L’ampleur de ces importations dépendra de la mobilisation possible des autres surfaces (jachères et surplus).
Mais dans tous les cas, l’Europe se retrouve, avec le recours à l’importation, amputée d’un argument de taille dans la mise sur le marché du bioéthanol.
 En effet, l’Europe perdrait ainsi l’indépendance énergétique qu’elle pensait avoir gagné en optant pour les biocarburants.